Valmagne, l'abbaye vigneronne...
Plantée depuis des siècles au cœur du vignoble languedocien Valmagne nous raconte l'Histoire de la région, qui se calque sur celle du pays tout entier.
C'est par un parfait paysage languedocien, au cœur de vignobles, que nous arrivons à Valmagne.
L'abbaye de Valmagne4 est fondée en 1138 par Raymond Trencavel, vicomte de Béziers. .... Valmagne suit d'abord la règle bénédictine. Le fort développement de l'ordre cistercien amène cependant l'abbaye à demander assez vite, en 1144, à .....être rattachée à Bonnevaux, fondation de Cîteaux, dans le Dauphiné. Trencavel s'y oppose sans succès : le rattachement est effectif en 1145....L'abbaye respectera alors les règles morales et architecturales de saint Bernard.
C'est actuellement l'une des abbayes cisterciennes les mieux conservées de France.
La façade principale est précédée par un narthex encadré de deux puissantes tours de défense. le narthex de l'église servait de vestibule pour la célébration de la messe pour les fidèles des environs. Il servait également de lieu de baptême pour les catéchumènes. Il est constitué de trois travées séparées par des arcs à doubleaux chanfreinés. Les chapiteaux et les culots de l'archivolte sont décorés en contradiction avec la règle cistercienne : "Secret de la Sagesse", "Moine partagé entre le Bien et le Mal", "Moine soutenant les Pécheurs", "Saint Louis à la tête couronnée et fleur de lysée".
Saint Louis, Blanche de Castille (?)
Un moine soutenant les pêcheurs :
Ces sculptures sont d'autant plus intéressantes qu'elles sont en contradiction avec la Règle cistercienne de l'austérité sans aucun ornement.
Les trois secrets de la sagesse, ne rien entendre, ne rien voir et ne rien dire, que j'ai si souvent vus illustrés par les trois singes asiatiques se trouvent déjà à Valmagne :
Nous voici dans la nef :
Soumise à la règle cistercienne, la décoration de l'église est par conséquent réduite au minimum : clés de voûte des croisées d'ogives et éléments végétaux sur les chapiteaux des piliers. .... Par ailleurs, le bâtiment héberge encore les foudres (inutilisés aujourd'hui) de la production de vin du domaine local dans les chapelles latérales (l'église ayant été transformée en chai sous la Révolution).
Lors des guerres de religion, l'abbaye est presque abandonnée. L'abbé Vincent Concomblet de Saint-Séverin, en poste depuis quatre ans, embrasse la religion réformée et fait le siège des lieux8. En 1575, une attaque des Huguenots brise tous les vitraux de l'église ; les dégâts sont considérables, notamment dans le cloître. Les moines sont massacrés lors de ces conflits . L'un d'entre eux, le moine Nonenque9 était le moine cellérier de l'abbaye. Réputé pour ses grandes compétences vinicoles, Nonenque est aujourd'hui devenue l'une des premières cuvées du domaine de Valmagne.
Pendant une quarantaine d'années, l'abbaye reste déserte : elle devient un repaire de brigands. Les moines reviennent à Valmagne au début du XVIIe siècle. Ils font revivre l'abbaye en commençant par des travaux de restauration. Des parties de l'église, notamment les fenêtres aux vitraux brisés, sont ainsi murées pour éviter toute chute.
On remarque plus précisément la clé de voûte de l'abside représentant le couronnement de la vierge et celle de la travée du chœur montrant saint Benoît et saint Bernard. La chapelle du chevet est également ornée d'une vierge du XVIIe siècle.
Un croix où des sarments de vigne remplacent le Christ...
L'abbaye possède un magnifique cloître sur lequel s'ouvre la salle du chapitre, le paroir et la salle des moines.
La salle capitulaire constitue une des parties les plus anciennes (XIIe siècle) et les plus importantes de l'abbaye. Les moines y viennent tous les matins, au sortir de l'office. Les profès sur les bancs de pierre, les convers, sans "voix au chapître", dans la galerie et l'abbé sur sa chaire adossée à l'orient, on y lit la règle, le "rouleau des morts" et autres nouvelles de l'ordre. On y rend aussi la justice.
Son accès s'effectue, depuis le cloître, par un portail flanqué de grandes fenêtres doubles de chaque côté, le tout supporté par des colonnettes et des chapiteaux de différents types : feuille d'acanthe, feuille plate, feuille d'eau. Certaines de ces colonnes sont en marbre et proviennent sans doute d'une villa romaine préexistante. De beaux vases du cardinal de Bonzi ont été placés entre les baies. Une nef unique, sans piliers, supporte la voûte surbaissée en anse de panier.
L'aile Est du cloître date du XIIe siècle, ainsi que la bibliothèque, la sacristie, la salle capitulaire, le parloir et la salle des moines. le reste du cloître, date du XIVe siècle. Il est constitué d'une cour de grandes dimensions fermée de chaque côté par cinq grandes arches séparées par des contreforts. Chacune de ces arches présente une suite de quatre arcs plus petits eux-mêmes surmontés d'un oculus. Au-delà de ces arches, quatre galeries font office de préau.
La galerie nord servait à la lecture et au mandatum tandis que la galerie orientale, la plus ancienne, ouvrait sur l'armarium, la sacristie, la salle capitulaire et le parloir. L'armarium est très modeste : étagères de livres de prières couronnées d'un plein cintre en dents de scie. La sacristie, surmontée d'une voûte romane et précédée d'une porte en plein cintre également ornée d'une décoration en dents de scie, est la chapelle de l'abbé qui y conservait les objets du culte.
La galerie ouest, ou "aile des convers", longe des bâtiments du XIIe siècle (réfectoire des convers) tandis que la galerie méridionale précède le réfectoire des moines.
le réfectoire a été restauré et agrandi par la suppression du scriptorium et du parloir. au XVIIIé siècle avant la décadence définitive de l'abbaye et son saccage sous la Révolution.
Mais à quelque chose malheur est bon : la Révolution s'empara de l'abbaye comme Bien National et la vendit à un viticulteur qui en fit ses chais, et ainsi elle ne fut pas démolie !
Dans le cloître un étrange bâtiment à colonnes envahies de verdure nous intrigue.
Près de l'aile sud du cloître, le lavabo se trouve devant le réfectoire (afin que les moines se purifient les mains avant de toucher le pain, symbole sacré). Une clôture octogonale avec une série de trois arcs de chaque côté, reposant sur des colonnettes jumelées, enserre une fontaine. Un répertoire varié (trilobes, quatre feuilles, anneaux), aux remplages monoblocs, complète cet ensemble. Celui-ci est couvert de huit nervures de pierre se réunissant au centre par une clé pendante. La végétation, apportant de l'ombre au lieu en plein été, est supportée par une treille. Alimentée par la source de Diane17, la fontaine déverse son eau pure de la vasque supérieure vers un bassin octogonal par quatre têtes de griffons.
Le jardin du cloître, enserré entre les quatre galeries et autour de la fontaine-lavabo, expose des roses de Cîteaux, créées par Delbard, et des bambous noirs, lui conférant ainsi un charme tout à fait particulier.
J'avoue que j'adore ce lavabo, sa fraîcheur, le bruit de la fontaine, et comme un clin d'œil personnel à mon amour du Japon, la belle carpe Koï qui nage dans le bassin :
Encadrée par les arches du lavabo, la vue est belle sur l'arrière du clocher :
le tronc de la vieille treille :
A l'entrée de l'abbaye, la Porterie (ou chapelle Saint-Blaise),
Le jardin de Saint-Blaise, situé à l'extérieur, près de la Porterie reconstitue un jardin médiéval : "hortus" (plantes potagères) et "herbularius" (plantes médicinales ou simples).
La très belle allée de platanes par où nous avons quitté cette si belle abbaye !
Commentaires
J'aime les abbayes, je ne connaissais pas du tout celle-ci. Elle est magnifique de force et de sérénité. Ce devait-être fascinant, lorsque toutes les fresques ornaient les voûtes dont nous avons un aperçu. Mais le passage des siècles et ses aléas ont tout de même laissé un superbe ensemble, brut de pierre, épuré.
Être moine ici, devait être assez extraordinaire. ^^
Oui, elle n'est pas connue parce qu'elle est dans un domaine viticole, enfin, maintenant qu'elle est classée, les foudres ne sont plus là que pour la décoration !